Les récents scrutins ont révélé une fracture importante, inquiétante pour l’avenir : il y a la France des villes et la France des autres. Cette interprétation, je le sais, est contestée, mais les chiffres sont têtus. Les grandes agglomérations se développent, se transforment, créent des emplois et de la richesse, alors que les territoires ruraux n’arrivent pas à suivre, moins attractifs pour les créateurs, mal desservis, oubliés. Qui peut penser que la main de l’État, aussi volontaire soit-elle, suffirait à rétablir l’équilibre rompu ? Les territoires ont besoin de projets. Ils ont besoin aussi de capitaux, publics mais aussi privés. Ils ont besoin que les épargnants et les investisseurs s’intéressent à eux, et misent sur leur avenir…

Les épargnants souhaitent en priorité soutenir le développement de leurs territoires.

Une enquête d’OpinionWay de février 2017 nous apprend que justement, 75% des épargnants français souhaitent décider de la destination de leur épargne. Ils disent vouloir non seulement savoir où est investi leur argent, à quoi il sert, mais aussi choisir eux-mêmes sa destination. Voilà qui va plus loin qu’une simple demande de transparence et de traçabilité, comme on a tendance à le croire. À la question « Que souhaitez-vous financer en priorité avec votre épargne ? », ils répondent d’abord, à 74%, « Des projets locaux et régionaux », devant « Le financement de l’innovation » (à 69%). D’autres enquêtes montrent l’intérêt croissant d’un côté pour l’ISR (Investissement Socialement Responsable), d’un autre, pour ce que l’on appelle l’Impact Investing (investissement d’Impact) qui adresse des projets locaux alliant rentabilité et bénéfices environnementaux et sociaux. La demande est donc bien là…

La plupart des produits financiers négligent l’investissement local.

Ils adressent les actions des grandes entreprises, l’immobilier des grandes métropoles, le capital des startups en croissance. Regardez les emails publicitaires que vous recevez. Ils vous proposent d’investir dans de biens immobiliers en couronne parisienne, ou à la rigueur, à Lyon, Bordeaux, Toulouse…, et s’aventurent exceptionnellement « en-dessous ». S’ils vous proposent des placements en actions, ce sont celles des sociétés cotées. Les produits financiers qui intéressent les entreprises non cotées ne sont pas légion, et adressent en général les PME urbaines innovantes plutôt que les entreprises traditionnelles de nos territoires. Les plateformes de crowdfunding proposent bien d’investir dans ces entreprises locales, mais leurs volumes d’activité sont encore confidentiels. Disons-le clairement, l’offre reste sous-dimensionnée par rapport à la demande.

Face à la demande, peu de solutions.

Le frein à ce développement tient je crois à trois raisons : d’abord, les établissements bancaires distribuent des produits conçus par des grandes sociétés de gestion internationales, proches des marchés boursiers, qui pour des raisons de culture et de commodité n’investissent pas le tissu économique régional ; la conception de produits d’investissement locaux demande une connaissance fine et subtile des territoires et le déploiement de beaucoup d’attention de proximité et d’énergie. C’est coûteux, donc dissuasif ; il n’y a pas d’incitation fiscale spécifique suffisante pour les entreprises territoriales, le régime des FIP (Fonds d’Investissement de Proximité) étant devenu trop restrictif.

Au regard des enjeux, la question mérite d’être sérieusement travaillée. La transition environnementale et sociale passe indiscutablement par les investissements et les dynamismes régionaux. Elle exige d’orienter d’avantage l’épargne vers les projets des territoires. C’est justement la vocation de La Financière Pouyanne…

Jean PHILIPPE, le 5 juillet 2017